Pourquoi on perd la motivation après le réveil spirituel ? Le désert de l’âme selon Carl Jung.

Cette émission est basée sur cette vidéo (en anglais) : Pourquoi vous n’avez AUCUNE MOTIVATION après l’éveil spirituel – Carl Jung explique

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Un tournant dans le voyage intérieur

À un moment de votre cheminement, peut-être après une révélation spirituelle majeure ou une crise personnelle, quelque chose a changé. Vous avez perçu l’illusion, les schémas répétitifs, le bruit incessant… puis, le silence. Au début, ce silence était puissant, presque libérateur. Mais peu à peu, le sens de votre existence s’est évanoui. Pas d’un coup, pas de manière spectaculaire, mais doucement, comme si votre âme avait baissé le volume de la vie et oublié de le remonter. Vous avez cessé de courir après les choses. Vous avez cessé de vous en soucier. Pas par négligence, mais dans un soupir existentiel discret. Une question a commencé à murmurer en vous, de plus en plus fort : Pourquoi me sens-je si engourdi maintenant que je vois la vérité ?

Le paradoxe de l’éveil

On s’attend à ce que l’éveil spirituel embrase notre passion, qu’il nous illumine. Pourtant, pour beaucoup, en particulier les âmes introspectives, les empathes, les chercheurs de vérité, il produit l’effet inverse : il nous vide. Une amie, brillante et spirituellement éveillée, passionnée par les écrits d’Eckhart Tolle, Alan Watts ou Krishnamurti, m’a raconté son expérience. Après une nuit sombre de l’âme, elle a eu une révélation. Elle a vu à travers l’illusion de l’ego, de la quête de succès extérieur. Mais deux mois plus tard, elle se retrouvait à fixer son plafond, incapable de sortir du lit. Elle m’a confié : « Avant, je pleurais de ne pas en faire assez. Maintenant, je me fiche de faire quoi que ce soit. Je pensais que l’éveil allait m’enflammer, pas me laisser ainsi. »

Carl Jung et la mort psychologique

Carl Jung, père de la psychologie analytique, avait déjà pressenti ce brouillard post-éveil. Sans utiliser le jargon spirituel à la mode, il comprenait ce qui se passe lorsque l’inconscient devient conscient. Il disait : « L’illumination ne vient pas en imaginant des figures de lumière, mais en rendant l’obscurité consciente. » Cette phrase est magnifique, mais elle révèle une vérité brutale : l’éveil n’est pas une fin, c’est le début d’une mort psychologique. La mort de celui que vous pensiez être. Les structures qui donnaient du sens à votre vie – objectifs, carrière, relations, même votre perception du temps – s’effondrent.

Mais voici le piège : votre ego n’a pas disparu, il est désorienté. Il a perdu sa carte. Sans nouvelle direction, la motivation s’évanouit. Vous n’êtes pas déprimé, ni démotivé au sens classique. Vous êtes en transition, dans un entre-deux. Vous vous êtes réveillé d’un rêve, mais vous n’êtes pas encore entré dans une nouvelle réalité.

Une pause sacrée

Ce que vous ressentez n’est pas un échec. Ce n’est pas une dépression clinique. C’est quelque chose d’ancien, de sacré. Jung avertissait que notre monde moderne fuit cette phase à tout prix. Cette pause sacrée, ce vide, cet entre-deux, est essentielle pour ce qu’il appelait l’individuation : le processus de devenir votre « moi » authentique. Pourtant, personne ne vous parle de cette étape, n’est-ce pas ?

Dans notre société hyperproductive, ce silence est souvent mal interprété comme de la paresse, cette pause comme une paralysie. Vous vous jugez, et ce jugement bloque l’énergie que votre âme cherche à faire remonter. Jung avait un terme pour cette pause psychologique : enantiodromia, le processus par lequel les choses basculent vers leur opposé. Lors de l’éveil, votre pendulum intérieur passe de l’effort effréné dicté par l’ego à une immobilité guidée par l’âme. Vous passez de « je dois tout faire » à « pourquoi faire quoi que ce soit ? » Ce basculement est sacré, c’est ainsi que l’équilibre se restaure.

La chrysalide et la dissolution

Dans les mythes et les enseignements anciens, c’est la phase de l’ermite, la mort avant la renaissance. C’est le moment où la chenille se dissout en une soupe informe dans son cocon. Ni papillon, ni chenille, juste un chaos liquide. Et oui, ce chaos ne « produit » rien, il ne court pas, il ne s’agite pas. Il se dissout. L’ego panique face à cette dissolution, réclamant action, identité, direction. Mais l’âme murmure : Lâche prise, je construis quelque chose de plus profond.

La spiritualité moderne omet souvent cette partie difficile. Elle prône de « suivre sa joie » ou de « vibrer haut ». Mais Jung dirait que contourner l’obscurité, c’est passer à côté du trésor. L’intégration de l’ombre – faire face aux parties refoulées et inconfortables de vous-même – est essentielle pour devenir entier. Ce vide sacré que vous ressentez est l’espace où l’inconscient peut enfin émerger. Vous ne sombrez pas, vous métabolisez.

Une nouvelle flamme

Et voici la beauté de ce processus : lorsque vous cessez de résister au vide, quelque chose d’étrange se produit. La motivation revient, mais elle est différente. Elle n’est ni anxieuse, ni performative, ni dictée par la frénésie. C’est un mouvement guidé par l’âme, qui ressemble plus à un souvenir qu’à une chasse. Jung appelait cela l’émergence du Soi, non pas comme un concept, mais comme une boussole intérieure vivante.

Vous avez traversé le vide, ressenti le silence, l’immobilité profonde. Maintenant, quelque chose de nouveau commence à s’éveiller en vous. Pas un éclair, pas un feu d’artifice, mais une traction douce, intérieure. Pas pour retourner à votre ancienne vie, mais pour en construire une nouvelle. C’est ici que le Soi commence à parler – pas en mots, mais en intuitions, en résonances, en ce que Jung appelait la vie symbolique. Il croyait qu’une fois l’ego soumis et l’inconscient intégré, nous devenons capables de vivre depuis un lieu plus profond que la personnalité. La vie cesse d’être une question de survie pour devenir une quête de sens.

Vivre depuis le Soi

Vivre depuis le Soi ne signifie pas être toujours motivé au sens classique. Vous ressentirez encore des vagues de fatigue, de confusion, voire de chagrin – c’est humain. Mais vous ne ressentirez plus ce sentiment constant de trahison intérieure, cette impression de vous traîner dans une vie qui ne vous correspond pas. Vous commencerez à créer, même sans public. Vous direz non à ce qui ne résonne pas, même si cela semble séduisant. Vous suivrez votre curiosité, pas votre liste de tâches. Vous choisirez la paix plutôt que la performance.

Ce nouveau carburant n’est pas l’adrénaline, c’est l’alignement. Jung appelait cela vivre symboliquement : faire confiance à vos images intérieures, vos rêves, vos synchronicités, vos intuitions comme des guides. En pratique, cela peut être aussi simple que poser des questions différentes :

Qu’est-ce qui m’appelle doucement ? au lieu de Que dois-je faire ?
Où la vie me guide-t-elle ? au lieu de Quel est le plan ?
Qu’est-ce qui est honnête ? au lieu de Comment puis-je prouver ma valeur ?

Une ambition transformée

Cela ne signifie pas abandonner l’ambition, mais la transformer. L’ambition devient une dévotion à la vérité, à la présence, à la croissance. Et ironiquement, cette énergie est bien plus efficace que celle de l’ego, et elle est durable, alimentée par l’âme. Ce n’est pas pour impressionner, mais pour exprimer. Cela vous pousse à créer, servir, guérir, enseigner, construire – non pas parce que vous le devez, mais parce que tout votre être dit oui.

Si vous avez l’impression que votre étincelle s’est éteinte après l’éveil, sachez que c’est l’ancien feu qui s’est consumé pour laisser place à une flamme plus profonde, une flamme qui ne vacille pas au gré des vents extérieurs. Jung ne promettait pas un chemin facile, mais si vous comprenez le sujet abordé ici, vous êtes déjà sur ce chemin. Il ne s’agit pas de retrouver votre ancienne motivation, mais d’en découvrir une nouvelle, ancrée dans la complétude, pas dans la performance. Ce n’est pas la fin de votre éveil, c’est le début de votre devenir.

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